Parmi les nouveaux moyens d’investigation dont le législateur (Loi de Finances rectificative pour 2016, article 14) vient de doter l’administration fiscale, figure une nouvelle procédure de contrôle fiscal à distance dénommé « examen de comptabilité » qui s’inscrit dans la volonté du Gouvernement d’augmenter les contrôles.
Dorénavant, l’administration peut choisir, à sa discrétion, de procéder à une classique vérification de comptabilité sur place, un contrôle sur pièces ou bien, un examen à distance. En théorie, le souhait du législateur est d’éviter les contrôles sur place si les enjeux et la « typologie » de l’entreprise ne s’y prêtent pas. Nous y voyons plutôt un nouveau moyen d’investigation dont il convient de cerner les contours afin d’éviter certains écueils et des conséquences financières pouvant être lourdes pour l’entreprise.
Le déroulement de l’examen « à distance »
En cas de mise en oeuvre par l’administration fiscale de l’examen « à distance », la procédure débute par l’envoi d’un « avis d’examen de comptabilité » précisant la période objet de l’examen. A réception, le contribuable tenu d’établir sa comptabilité de manière informatisée doit adresser à l’administration, de manière dématérialisée, dans un délai de quinze jours, le fichier des écritures comptables (dit « FEC ») relatif aux années vérifiées. Il est donc impératif que les contribuables disposent de logiciels comptables à jour et conformes à la réglementation, sachant que certains logiciels comptables sont encore à ce jour source de difficultés.
Si le contribuable ne procède pas à l’envoi des fichiers dans le délai requis, l’administration lui applique une amende de 5 000 euros et peut remplacer l’examen à distance par une vérification de comptabilité. Il est donc fortement recommandé aux entreprises de tester leur FEC chaque année après l’envoi de la liasse fiscale.
Si la société respecte le délai de quinze jours et après réception du FEC, l’administration dispose d’un délai de six mois pour se prononcer sur la transmission d’une éventuelle proposition de rectification fiscale au contribuable. Durant ce délai, l’administration fiscale peut demander des éclaircissements ou des justifications sur la comptabilité. Elle aura également la possibilité d’effectuer des tris, classements et des calculs sur les fichiers transmis mais également des traitements informatiques, ce qui pose aujourd’hui question car l’encadrement législatif est inexistant sur ce point.
Le champ d’intervention des services fiscaux est donc très vaste, ce qui pose un réel problème quant au dialogue pouvant s’établir entre la société contrôlée à distance et l’inspecteur des services fiscaux.
Le respect du « débat oral et contradictoire »
Cette nouvelle procédure de contrôle pose la question de sa compatibilité avec le principe du débat oral et contradictoire qui est une garantie pour chaque contribuable vérifié dans le cadre d’une classique vérification de comptabilité. En effet, le contrôle n’étant plus fait sur place, le contribuable ne peut pas directement dialoguer et argumenter avec le vérificateur.
Afin de garantir le respect de ce droit fondamental, le législateur a précisé que le dialogue entre l’administration fiscale et l’entreprise prendra la forme d’ »échanges écrits ou oraux au cours de la procédure ». Reste à savoir en pratique comment ces échanges vont concrètement pouvoir s’instaurer.
A l’issue de la période de six mois, le contribuable sera informé de la nature et du résultat des traitements informatiques donnant lieu à des rehaussements lors de l’envoi de la proposition de rectification. Aussi, le législateur a indiqué que « la possibilité d’une régularisation par le contribuable de ses erreurs, inexactitudes, omissions ou insuffisances, dès lors que sa bonne foi ne sera pas remise en cause, sera possible dans le cadre de cette procédure ». Dès lors, il sera possible de mettre en œuvre la procédure de régularisation spontanée (article L 62 du Livre des procédures fiscales) dans un délai de trente jours après réception de la proposition de rectification, et non durant le déroulement de la procédure comme c’est le cas pour une vérification de comptabilité, ce qui est regrettable.
Comme en matière de vérification comptable, l’administration fiscale doit tenir informé le contribuable de la fin des opérations et en cas de rectification, elle doit indiquer au contribuable les conséquences financières du contrôle.
A l’issue de l’examen de comptabilité, l’administration ne pourra pas procéder à une vérification de comptabilité générale sur la période examinée et sera tenue de restituer les fichiers des écritures comptables à l’entreprise.
Cette nouvelle procédure de par ses faiblesses et manquements devraient générer des contentieux sur la régularité de la procédure.